Mathieu Bock-Côté : maître censeur.


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Mathieu Bock-Côté publiait dans son blog, le 27 mai 2013, un billet à propos d’un mensuel français de droite venant tout juste d’arriver en kiosque, le Causeur. À titre de commentaire, je lui faisais parvenir le message suivant sur sa publication Facebook :

Début de citation

«Monsieur, tant vos écrits que les lectures que vous proposez sur votre blogue témoignent de votre idéal social qui rejoint à plusieurs égards celui d’une certaine droite française. Je dis «certaine droite» afin d’éviter le terme honni d’extrême-droite avec laquelle vous flirtez sur divers sujets, la question identitaire notamment. Celle-ci se veut, ouvertement et de manière totalement décomplexée, réactionnaire, démagogique et populiste. Se réfugiant sous le concept de «la libre pensée», elle tend à exacerber les tensions sociales, à défaut d’être apte à déployer les efforts nécessaires pour y remédier, en orientant le débat non pas sur ses causes intrinsèques- chômage, précarité, freins à l’emploi- mais sur les symptômes qu’elles génèrent: problèmes d’intégration, communautarisme, ostracisme.

Ces discours et analyses sont contreproductifs en ce sens que vous répondez à la colère des communautés immigrées par l’argument qui l’a fait naître : qu’ils sont à l’origine du cancer qui ronge la société – dans ce cas-ci – française. Mais dire cela occulterait le sort des dizaines de milliers d’ouvriers et soldats étrangers auxquels on avait promis nationalité française et égalité des chances, et qui n’ont trouvé que des HLM et l’exclusion sociale.

Il est bien évident que des problèmes importants existent au sein des communautés issues de l’immigration et qu’elles doivent impérativement y faire face. Mais entre une conscientisation collective vis-à-vis des torts dont tant la société d’accueil que les nouveaux arrivants se rendent coupables et le détournement de ce débat en stigmatisation de ces derniers, lesquels seraient la source de la faillite sociale, il y a un pas qu’il serait tendancieux de franchir.

Dans un monde où la globalisation poursuit sa course effrénée et inexorable, il s’avère tentant, mais ô combien simpliste, d’imputer à «l’autre», «l’altérité», la responsabilité de tous les maux qui nous accablent. Les tragiques événements qui jalonnent l’Histoire, n’émanent-ils pas de grandes crises économiques et sociales auxquelles on a promptement désigné un «coupable» afin d’orienter la grogne populaire vers un bouc émissaire facilement identifiable, et d’ainsi éviter le chaos?»

Fin de citation

Au lieu de répondre à ce message ou simplement l’ignorer, M. Bock-Côté a fait preuve d’un manque flagrant de professionnalisme et de tolérance en me bloquant sur les réseaux Twitter et Facebook. S’il y a quelque chose que j’abhorre au plus haut point, c’est bien la censure. Et quand on est affublé du titre de chroniqueur, la déontologie impose qu’il faut accepter le débat, la confrontation d’idées, la diversité d’opinions et non pas user de censure à tel point qu’on se croirait revenu à des régimes révolus où la pensée unique et le discours ostracisant étaient omniprésents et s’imposaient à tous.

On a, sans nul doute, le loisir de dire toutes sortes de choses, fussent-elles fausses. Encore faut-il que l’on accepte d’en débattre sans s’adonner à un musellement systématique de tous les arguments contredisant notre discours. À moins que l’on n’ait pas d’arguments et que le seul moyen de discuter dont on dispose est la fuite en avant et la coupure ce qui semble bien être le cas pour Monsieur le journaliste Mathieu Bock-Côté.

La liberté d’expression a ceci de primordial : si on a la liberté de tout dire, il faut admettre que notre vérité ne peut pas être toujours la Vérité, que nous acceptions d’en débattre et d’argumenter pour convaincre. En dehors de ces lignes, c’est l’imposition de notre point de vue qui est recherchée, en d’autres termes, la dictature de pensée.

Je vous laisse sur une citation de Voltaire que vous devriez méditer : «je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous puissiez le dire.»

Richard Martineau: qu’en est-il du contenu?


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Sous la rubrique « FRANC PARLER » de Richard Martineau, le Journal de Montréal a publié, le jeudi 4 avril courant, un texte d’une effroyable insipidité. Contenant 525 mots (ponctuation non comprise), celui-ci, selon son titre, était supposé traiter du concept de la souveraineté chez le Parti Québécois. À la fin de la lecture, l’impression qui me reste est que ce texte était là pour meubler un espace vide du journal. Mais remplir le vide par du vide, quel intérêt le lecteur en retire-t-il?

525 mots, c’est, en général, amplement suffisant pour exposer des faits et développer une explication synthétique. Or, qu’expose, dans ce texte, Richard Martineau?

Une chronique truffée d’images réductrices, à l’emporte-pièce qui insulte l’intelligence du lecteur et qui utilise un langage que ne désavoueraient pas les discussions de bastringue de bas étage.

Comme on présume que Richard Martineau a à cœur le fait que le lecteur comprenne bien les dessous de la souveraineté, il n’hésite pas, pour ce faire, à avoir recours à des métaphores gastronomiques, climatiques, environnementales et autres. J’en prends quelques-unes qui sont assez éloquentes de la verve de notre chroniqueur en matière de raccourcis. Admirons au passage la profondeur de l’analyse et la justesse du cliché (sic et resic!)

«Si vous n’aimez pas le smoked meat, voulez-vous me dire pourquoi vous allez chez SCHWARTZ?»

«Si tu n’aimes pas la chaleur, veux-tu me dire pourquoi tu es allé au Maroc en plein été?»

«Quand on va à la maison du spaghetti, on mange du spaghetti. Quand on va à la maison, on mange du curry.»

On conviendra qu’expliquer la souveraineté de cette façon est assez inhabituel et tout à fait incongru. Cela témoigne, sans conteste, de la volonté réductrice de l’auteur envers une option fondamentale pour une nation. Une option qui fait appel à des enjeux cruciaux et qui engage des décisions déterminantes pour l’avenir de deux nations.

Le texte est une succession de questions qui rappellent certaines répliques de mauvais humoristes, lesquels au moins, ont le mérite de jouer sur un autre registre. Neuf questions, tout aussi inconsistantes et creuses les unes que les autres et qui ont constitué, rendez-vous compte, la structure de sept petits paragraphes. J’en prends, au hasard, quelques-unes pour en démontrer la fatuité :

«Me semble que c’est clair, non?»

«Coudonc, lisez-vous le programme des partis quand vous votez ou basez-vous votre vote sur la couleur de la cravate ou -du châle- du chef?»

«La moindre des choses est qu’il dirige, non?»

«C’est quoi, les élections, selon vous? Un concours de popularité? Une version politique de La Voix?»

Et comme on sent que le chroniqueur manque de matière pour meubler l’espace qui lui est offert par le journal, il ne se gêne pas pour reprendre in extenso les articles 1.1 et 1.2 du programme du Parti Québécois. Ces deux articles contiennent, à eux seuls, 59 mots soit 11,04% de tout son texte. Ahurissant!

Quant à la défense et à la promotion du français, on repassera : des mots qui se disent-on en convient- couramment dans la rue mais qui, normalement ne devraient pas s’écrire pas dans une chronique qui se respecte, figurent en bonne place dans le texte (coudonc, le boutte, je suis tanné…)

Passons en revue quelques statistiques parce qu’elles sont véritablement édifiantes

Les 2 articles du programme du P.Q : 59 mots

Les assertions climatiques et culinaires : 69 mots

Les questions que je qualifierai de «défonce les portes ouvertes! » : 79 mots

Soit 207 mots. Quasiment 40% du texte…

Pour reprendre le style Martineau, je me hasarderai à soulever cette question : ces statistiques, est-ce assez convaincant de la pertinence du texte et de sa richesse?

En vérité, ce texte me renforce dans la conviction que j’avais selon laquelle Richard Martineau ne fait que brasser du vide. Qu’on l’écoute ou qu’on le lise ne changera rien : c’est toujours le même langage distillé au forceps, manque flagrant d’arguments, des idées clairement de droite mais assénées sans structure ni fondement. On peut s’opposer sur un sujet et en débattre vivement, en reconnaissant à l’autre partie la pertinence de son argumentaire et de son analyse. L’exemple du chroniqueur- et collègue de Martineau au Journal de Montréal- Mathieu Bock-Côté peut être, dans ce cas-là, mis de l’avant : un journaliste dont je ne partage pas les opinions mais qui avance des idées structurées et qui développe des analyses étayées par un argumentaire respectable. Avec Richard Martineau, on n’est pas seulement en opposition sur l’idée qu’il défend mais également sur la façon qu’il a (ou qu’il n’a pas) de la présenter. Tout ce qui me reste, après l’avoir lu et écouté, c’est seulement cette désagréable sensation d’être intellectuellement resté sur ma faim…