Attentat de Boston : De la joie au désarroi…

Image

Les encouragements ont fait place aux hurlements; la joie à la consternation, au choc et à la désolation.

Au terme de la 116e édition du marathon de Boston, les acclamations rituelles de la foule massée près de la ligne d’arrivée ont été étouffées par deux déflagrations quasi simultanées.

L’évènement qui cette année était dédié, pour son dernier «mile», aux victimes de la tuerie de Newtown, en fut, malheureusement, une réminiscence. On a assisté à la même incompréhension. Le même désarroi. La même réprobation à l’égard du sadisme et de l’inhumanité auxquels l’Homme peut, dans des moments de folie incompréhensibles, avoir recours.

Au moment où j’écris ces lignes, la police serait en voie de mettre en état d’arrestation les auteurs de l’attentat qui s’apprêtaient à récidiver sur le terrain du prestigieux Massachussets Institute of Technology (MIT). Malgré cette avancée majeure de l’enquête, d’innombrables zones d’ombres subsistent : toujours aucune précision sur les motifs de l’opération, une pléthore de rumeurs, des informations erronées fusant de toute part…

Toujours est-il que sur les réseaux sociaux de même que dans les médias traditionnels, deux lourdes tendances se dessinent d’ores et déjà.

D’une part, se trouve ceux qui refusent obstinément de condamner ou de démontrer ne serait-ce qu’une once d’empathie envers le peuple américain. Ne voyant dans cet acte barbare qu’un simple retour de balancier; une façon de venger les crimes et exactions commis- ou orchestrés- par les États-Unis.

Cette position est on ne peut plus démagogique: la comparaison et la hiérarchisation des souffrances sont totalement inadmissibles. Toute mort en est une de trop!

D’un point de vue moral, il est tout aussi abject de refuser d’éprouver de la sympathie pour les victimes et leurs proches que de qualifier les massacres de populations civiles de «dommages collatéraux». Le massacre d’innocents, quelle que soit leur provenance, est toujours déplorable et se doit de soulever l’indignation populaire; la mort ne s’embarrassant pas des distinctions ethniques, il devrait en être de même pour la compassion. Or, il n’est pire déshonneur à la mémoire de ceux ayant péri injustement que d’en augmenter le nombre déjà effarant…

Si pour certains la Vendetta rétablit un ordre que la commission d’un crime aurait chamboulé, il n’en découle, en fait, qu’un déséquilibre plus grand encore. Enlever la vie d’âmes innocentes ne lavera jamais l’affront d’avoir vu le sang des «nôtres» couler; les morts ne feront que s’empiler. L’auteur Miguel de Cervantès disait «Les vengeances châtient, mais n’éliminent pas les fautes.»

D’autre part, alors même qu’il reste à faire la lumière sur les dessous de cette histoire, certains ont décrété (dans leur grande clairvoyance) qu’il s’agit d’un crime relié au «Jihad». Certes, cette piste n’est pas à écarter et, si elle se confirme, sera à condamner fermement ; cela est vrai quel que soit le mobile de ces terroristes. Mais là où le bât blesse, c’est lorsque l’on se rend compte que pour d’aucuns cela relève plus de l’espérance de que de la simple spéculation.

Ils voudraient que ce soit «eux» qui aient fomenté cet acte barbare ne serait-ce que pour pouvoir déverser le fiel islamophobe qu’ils dissimulent tant bien que mal, mais qui refait surface ponctuellement au gré des dépêches de presse. Cela les conforte, assurément, dans leur volonté de voir les musulmans de partout sur la planète comme faisant partie de «l’axe du mal». Leur justification est toute simple : susciter l’émotion et la colère par l’évocation de l’horreur qu’a provoqué l’attentat et n’hésitant pas à user de l’amalgame islamiste et musulman en l’associant, sans transition, au terrorisme. L’objectif est implicite : faire porter l’odieux à l’ensemble d’une communauté. Dans cette tendance, est-il besoin de souligner que le chroniqueur américain Erik Rush notamment a appelé à «tuer tous les musulmans».

Les terroristes doivent être mis hors d’état de nuire il n’y a pas l’ombre d’un doute là-dessus, mais cela ne doit en aucun cas se transformer en chasse aux sorcières. Tant les dérives du Maccarthysme que les suites du 11 septembre témoignent des dangers inhérents à la stigmatisation d’individus dont le seul tort est d’être de la même race ou de la même religion que des terroristes illuminés…

Pour l’heure, alors que l’épais brouillard entourant cette sordide affaire se dissipe peu à peu, au lieu d’y aller de conjectures hâtives, attendons que toute la lumière soit faite.

Gardons à l’esprit que la barbarie est exempte de frontières et que ceux qui s’y abaissent n’engagent qu’eux-mêmes et leurs partisans. Toutes les populations qui en sont victimes souffrent de ces actes de terreur commis par des individus qui agissent au nom de diverses idéologies.

Il est vrai que ces scènes de désolation sont plus courantes à Bagdad et à Damas, mais s’habitue-t-on jamais réellement à l’horreur?


Un commentaire


Laisser un commentaire